Dégustant une petite blanquette de veau aux "Charpentiers", vers Odéon-St-Michel en ce frigorifique dimanche de décembre, ma mastication s'interrompt à l'entrée d'un vendeur de journaux. Moi qui croyais que les vendeurs de rue n'existaient que dans les vieux films et les Tintins!

"Le JDD est arrivé!" crie-t-il, "Johnny s'est réveillé!". Ah. "Johnny s'est réveillé! Laeticia souffre!" et fier de sa formule, il la répète une quinzaine de fois, rapidement et dans l'urgence, comme si la nation entière attendait cette nouvelle capitale, et qu'il lui fallait la délivrer aux quatre coins du pays.
Etonné de la passivité des serveurs, je me tourne vers mon voisin, visiblement un habitué : "C'est qui lui?
- Lui, c'est Chico, me répond-il, le dernier vendeur de journaux à la criée de Paris! Il a déjà écrit deux bouquins!"
J'observe le phénomène, qui parvient à vendre la moitié de sa pile.
Je m'interroge : Pourquoi les bourgeois de ce restaurant , au lieu de leur réaction épidermique habituelle envers les gêneurs, ont plutôt l'air de s'enthousiasmer pour ce type un peu loufoque? La une du JDD ("Johnny s'est réveillé", on l'aura compris...) ne peut pas justifier cet intérêt, surtout de la part d'un tel public.
Alors Chico? bouffon pour bourgeois du dimanche déguisé en dernier des mohicans? Ou authentique espèce menacée, obligée de faire le bouffon pour bourgeois pour survivre?
Moi-même amusé de l'entendre débiter son "Johnny s'est réveillé! Mais Laeticia souffre!", je fais taire ma petite voix, et me marre franchement.
Après tout, c'est agréable un bouffon...

Après quelques lectures, je modifie ma problématique : Chico : bouffon? ou au top de la mode?